La lutte des âges. Comment les retraités ont pris le pouvoir (2016)

Editeur: Flammarion (31 août 2016)
Pages: 174 pages
Format: ePUB, PDF, Doc, TXT, MP3, KINDLE, FB2
Langue: Français
Descriptions de livres
Ce livre est un cri d’alarme. La crise que nous traversons n’est pas d’abord une crise financière. Elle est la manifestation d’un phénomène démographique inédit dans l’histoire de l’humanité : pour la première fois, les seniors – et plus particulièrement les retraités – ont pris le pouvoir, démocratique et économique, aux dépens des générations montantes. Cette crise touche le monde entier. Elle n’oppose pas le Nord au Sud, les travailleurs aux paresseux, les hommes aux femmes. Elle oppose à l’intérieur d’un même pays les plus âgés aux plus jeunes, en une lutte des âges d’autant plus féroce qu’elle est silencieuse. Il est temps de faire de ce sujet un débat de société. Comment favoriser le transfert de pouvoir entre les générations ? Comment revenir à plus de justice et de solidarité ? Ce ne sont pas les solutions qui manquent. Encore faut-il avoir le courage de les mettre en œuvre.

Commentaires

L'introduction du livre fait craindre la maladresse. Hakim El Karoui décrit un monde en ruines, victime des baby boomers. Or, poser dès le départ ce qui pourrait être une conclusion s'apparente à une provocation, dans un sujet hautement sensible : l'auteur se condamne à être accusé de parti-pris et par conséquent à ne pas être écouté.
On connaissait les études de Louis Chauvel sur "Le Destin des Générations", qui montraient que les baby boomers avaient bénéficié de chances qui ont échappé aux générations plus jeunes, mais El Karoui va plus loin. Selon lui, les baby boomers, en raison de leur énorme poids démographique, peuvent imposer leurs intérêts propres à la société, d'autant plus que l'auteur croit pouvoir affirmer qu'ils les connaissent.
Comme ils sont maintenant de plus en plus retraités, ils font peser sur les actifs et l'économie un poids excessif. El Karoui montre que la part du patrimoine possédé par les catégories les plus âgées n'a cessé d'augmenter dans les dernières décennies et que le revenu des retraités est devenu récemment équivalent à celui des actifs. Or, dans un pays comme l'Allemagne, dont les succès économiques sont connus, les actifs ont été favorisés, ce qui montre que l'évolution n'est pas universelle. Il est naturel que le patrimoine soit possédé davantage par les vieux que par les jeunes, qui n'ont pas eu le temps de le constituer et d'hériter, mais on est arrivé aujourd'hui, en France notamment, à une situation de concentration inconnue des époques passées, notamment parce que l'immobilier a été acheté quand il était bon marché et qu'il est maintenu devenu trop cher pour être accessible aux jeunes générations, en plus dépourvues des moyens qu'avaient leurs aînés.
Là où le bât blesse, c'est qu'El Karoui prétend, par analogie avec la liberté sexuelle des années 70, que la libéralisation financière et des échanges est le choix des baby boomers. Or, s'il est évident que le poids du vote des générations nées après 1942 devenait important dès les années 80, El Karoui ne publie aucune étude sur le vote par catégories d'âges en faveur de Reagan ou en faveur du parti conservateur à l'époque de Thatcher... Il est d'ailleurs fort possible que cette génération, la plus révoltée de toutes, n'ait pas voté dans un sens conforme aux présupposés de l'auteur. El Karoui rate donc sa cible par excès.
Cet exemple montre bien que des événements contemporains ne sont pas forcément reliés par des rapports de causalité. La remise en ordre du monde sur le modèle néo-libéral (Thatcher 1979), l'islamisme militant (Khomeiny 1979) et l'arrivée massive dans l'électorat des baby boomers (en 1979, ceux qui avaient 18 ans étaient nés en 1961, c'est-à-dire que presque tous les baby boomers pouvaient voter dans la plupart des pays) se passent en même temps, mais que peut-on en dire ? Pour le premier point, la désagrégation du modèle économique des Trente Glorieuses supposait à terme qu'un nouveau modèle mondial s'installe.
L'auteur constate aussi que les vieux sont par nature conservateurs et il suppose donc que le vieillissement des baby boomers sera favorable à la droite (mais pour 2007, si les vieux ont voté de préférence pour Sarkozy, El Karoui ne semble disposer d'aucune donnée qui différencie les baby boomers des générations plus anciennes, à l'époque encore prédominantes chez les personnes âgées). Il imagine aussi, s'appuyant sur Dominique Reynié, que le progrès du populisme, entendre une attitude défavorable à l'immigration et favorable à la laïcité, donc anti-musulmane pour le dire vite (et il le dit vite) sera le résultat du vieillissement. Mais il oublie que la première génération massivement antiraciste et immigrationniste a justement été les baby boomers, et cet oubli témoignerait à mon avis d'une nécessité d'approfondir ce qui est affirmé de façon un peu péremptoire. Bien entendu, les idées politiques des baby boomers changent avec l'âge (mais en partant de leurs bases de départ).
Plusieurs pages sont consacrées au traitement de la crise des subprimes. El Karoui estime que le sauvetage en catastrophe a évité aux détenteurs de patrimoine (donc surtout aux baby boomers) une dévalorisation de leurs biens, mais en faisant augmenter la dette, c'est à dire en faisant payer les générations suivantes. L'auteur y voit la confirmation de l'idée que les baby boomers ont toujours su gérer leurs intérêts. J'aurais préféré que la longue description de ce qui a provoqué la crise, chose archi-connue, soit moins longue et que l'auteur passe un peu plus de temps à évaluer ce qui aurait pu se passer si on n'avait pas consolidé le système financier. L'auteur peut souvent être allusif sur des points où le lecteur moyen attendrait des éclaircissements.
Le livre a visiblement été rédigé très vite et mal ou pas du tout relu. Mais disons que c'est une réserve mineure....
La fin du livre est consacrée à des préconisations de politiques économiques moins favorables aux retraités, aux détenteurs de patrimoine et plus favorables aux jeunes et aux actifs : il s'agit (notamment) d'accepter une inflation raisonnable et de faire payer aux retraités eux-mêmes, en tout cas à ceux qui possèdent un patrimoine, une partie du poids des pensions de retraite et de la dépendance.
Ce livre d'économiste et de démographe est donc à lire, car il contient des richesses qu'il aurait été trop long de développer et car il montre bien les conséquences économiques dramatiques des déséquilibres liés au vieillissement, mais il court le risque, par manque de rigueur, par incapacité à prouver ce qu'il affirme, par une attitude trop unilatérale, de favoriser les réactions de défense de ceux dont il a démontré la puissance...
On peut se passer de lire la conclusion, qui témoigne des rêves pathétiques d'un chercheur qui doute de sa capacité d'influence. Il imagine quelqu'un qui a publié un livre tel que celui qu'il a écrit, qui tente de se faire écouter par un responsable politique de la majorité actuelle : le rêve d'être conseiller du prince, mais le prince, élu d'une population âgée, ne se montre pas capable de bien comprendre et de décider comme on le lui conseille...


4/5

Lien pour télécharger le fichier: ePUB
TÉLÉCHARGER
Lien pour télécharger le fichier: PDF, Doc, TXT, MP3, FB2, KINDLE
TÉLÉCHARGER
Lire en ligne gratuitement: EBOOK
LIRE en LIGNE
Les meilleures en Ebooks